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Le pouvoir de la gratitude

August 18, 2022
Par Vir C Advani

 

Le 15 juillet 2018, j’étais en direction de Toronto lorsque j’ai ressenti une douleur diffuse dans le bas du dos. Celle-ci s’est mise à empirer de jour en jour, mais mon médecin m’a informé que les résultats de mes examens médicaux ne démontraient aucune anomalie. En réalité, je n’étais qu’au début d’un parcours parsemé de souffrance et de désespoir qui allait durer deux ans. Si j’effectue un retour en arrière, au mois de juillet 2017, je venais de compléter mon MBA[i] à l’Université Queens de Kingston, en Ontario, et j’étais le major de ma promotion. Peu de temps après, j’ai été approché par un recruteur qui m’a offert un poste en or dans la plus grande banque du Canada. Plus tard, j’ai découvert qu’au moins mille candidats avaient postulé pour cet emploi et qu’à peine cinq d’entre eux avaient été sélectionnés. De façon mystique, je suis le seul à avoir été invité à passer un entretien, sans même avoir soumis ma candidature. Mon épouse et moi avons déménagé à Toronto par la suite. Elle a pu trouver un emploi presque sur le champ et les choses se présentaient bien pour nous. 

J’aimais mon travail, mais les horaires étaient longs et le contexte stressant, car j’étais dans un programme de formation en leadership très compétitif qui s’étendait sur une période de deux ans. Parfois, je pouvais être au bureau entre 12 à 14 heures par jour et ce, pendant des semaines. Durant mes périodes de liberté, je soutenais diverses activités au Centre de la SGI de Toronto, et j’assistais aux réunions bouddhiques dès que je le pouvais. Malgré mon emploi du temps chargé, je me forçais à faire de l’exercice et à me nourrir sainement, mais ce n’était pas suffisant. Quelques mois après avoir débuté mon nouvel emploi, je me suis mis à souffrir d’insomnie. Je ne dormais que quatre à cinq heures par nuit, parfois moins. J’ai commencé à manquer les Gongyo* du matin et du soir pour tenter de gagner quinze minutes de sommeil supplémentaires, car il m’arrivait de sortir tard avec mes collègues de travail. Ma façon de prier était devenue terne et monotone. Mon travail était désormais au centre de ma vie, et je désirais tellement être performant que je négligeais ma pratique bouddhique. Pourtant, malgré la détérioration de ma santé physique et mentale, j’avais tout de même l’impression, voire l’illusion d’avancer sur la bonne voie. 

Plus je me consacrais à ma carrière professionnelle, plus ma santé empirait, au point où mes maux de dos ont fini par prendre le dessus. Les mots ne peuvent décrire l’impact émotionnel qu’une douleur chronique peut avoir sur quelqu’un. Moi qui avais l’habitude de faire du sport cinq fois par semaine, je peinais à sortir de mon lit le matin. Je ne pouvais plus m’asseoir, m’allonger ou me tenir debout sans que ce ne soit un supplice. Un matin, je n’ai pas pu soulever mon petit garçon parce que j’avais trop mal. Le pire étant la souffrance émotionnelle, je me suis mis en retrait du reste du monde. Même si j’affichais une posture courageuse en public, au fond de moi, j’étais déprimé et complètement désespéré. J’ai commencé à développer de l’anxiété, et mon insomnie s’est aggravée. Je demeurais souvent éveillé toute la nuit dans mon lit, préoccupé par le sort que l’existence me réservait. Je dormais une à deux heures, me levais puis me préparais pour prendre le train de 5 h 30 qui m’amenait au bureau. Je revenais chez moi vers 19 h 00, ce qui me laissait à peine le temps suffisant pour souhaiter bonne nuit à mon fils et le border dans son lit. Ensuite, je mettais en pratique toutes sortes de thérapies pour soulager mon mal et croyez-moi, j’ai tout essayé. Puis, je me couchais pour passer une nouvelle nuit blanche. 

Ce cycle a duré très longtemps, m’obligeant souvent à m’absenter du bureau. Certains jours, j’appelais mon patron pour l’informer que je ne pouvais pas venir travailler car j’étais malade alors que dans les faits, je ne pouvais pas sortir du lit. J’étais trop embarrassé, ou sans doute trop fier, pour avouer à mes directeurs que je traversais une période difficile. Tout ce qu’ils savaient sur moi, c’est que j’étais très compétent professionnellement. Par conséquent, j’avais honte de leur révéler que j’éprouvais des difficultés. J’ai même été promu à un poste plus élevé, ce qui a été une surprise pour moi. Toutefois, cela n’atténuait en rien ma souffrance. À l’opposé, je me sentais davantage misérable parce que je devais endosser beaucoup plus de responsabilités qu’auparavant. La plupart des gens auraient été reconnaissants d’obtenir une telle promotion, mais ma condition de vie médiocre ne me permettait pas de ressentir de la joie. 

Tout au long de cette période, j’ai continué de participer aux réunions de la SGI et de réciter Nam-myoho-renge-kyo*. Cependant, ma foi était faible et la pratique bouddhique m’était devenue une corvée. En décembre 2019, j’ai atteint un point de rupture. J’ai informé ma conjointe que mon emploi ne m’intéressait plus et que je souhaitais retourner à Ottawa où vivaient des amis et une grande partie de notre famille. Je voulais changer de rythme et créer une possibilité de passer du temps de qualité avec notre fils. Ayant été témoin de la détérioration de mon état de santé, elle a immédiatement accepté. Il faut dire qu’elle aussi luttait dans son rôle de jeune mère ne recevant qu’un soutien limité de son partenaire. 

J’ai fait savoir à mon gestionnaire que j’avais l’intention de chercher de nouvelles opportunités de travail à Ottawa, lui expliquant franchement tout ce qui m’était arrivé. Il a été surpris et déçu, tout en comprenant que c’était nécessaire autant pour ma tranquillité d’esprit que pour ma famille. Il m’a demandé de rester jusqu’à ce que je trouve un poste à Ottawa, ce que j’ai accepté. J’ai quitté son bureau avec la lueur d’un espoir que je n’avais pas ressenti depuis longtemps. Se montrer honnête à propos de ma situation et donner la priorité à mes besoins plutôt qu’à ceux de mon employeur a été libérateur, comme si je passais un nouveau cap… et c’est alors que la COVID-19 est arrivée. Les occasions d’emploi à Ottawa se sont envolées. Mon portefeuille financier, destiné au versement d’un acompte sur notre future maison, a été réduit à néant. Notre plan de déménagement a été bouleversé et nous nous sommes retrouvés coincés. J’aurais pu m’apitoyer sur mon sort mais, à ce stade-ci, ma condition de vie s’était déjà transformée. Tout au long de cette période, sur une base hebdomadaire, j’ai reçu des encouragements par téléphone de la part de mes parents, ce qui m’a énormément aidé. Ma mère a joint la SGI de l’Inde avant ma naissance et mon père est lui aussi un pratiquant bouddhique de longue date. 

Le véritable tournant s’est néanmoins produit lorsque j’ai lu une directive qui m’a fait prendre conscience que ma pratique bouddhique et les activités de la SGI en faveur de kosen rufu* n’étaient pas des corvées mais des privilèges et des sources de bienfaits. Au lieu de rechigner à faire des efforts, je suis alors devenu proactif en répondant par la positive à tout ce que l’on me suggérait de faire. À la suite de quoi, au lieu de me sentir découragé, mon approche a complètement changé. J’avais la chance d’avoir encore un emploi sans devoir passer beaucoup de temps dans les transports pour me rendre au travail. Je pouvais cuisiner des repas à la maison et manger plus sainement. Je disposais de plus de temps avec ma famille, surtout avec mon fils. J’étais en mesure d’économiser plus d’argent que jamais auparavant. Je faisais de l’exercice régulièrement et je dormais davantage. De plus, ma confiance dans mon travail s’est accrue et, fait intéressant, mes maux de dos n’étaient plus aussi douloureux. Pendant cette période, j’ai beaucoup réfléchi au concept de « l’unité entre soi et son environnement », voire l’influence que notre condition de vie intérieure  exerce sur le monde extérieur. Il est devenu clair pour moi que toutes mes angoisses étaient intrinsèquement liées à mon attitude négative. J’ai donc fait le vœu de ne plus jamais m’apitoyer sur mon sort et d’entretenir un « cœur reconnaissant ». Ma foi est redevenue forte. Je récitais joyeusement Daimoku, tel le rugissement du lion. J’avais l’impression que l’univers entier avait changé sa trajectoire pour me soutenir, et ce n’était que le début d’une série de bienfaits qui dépassaient mes rêves les plus fous.

 

De gauche à droite : Virchandra, Kailash (père), Rahul (frère) et Anjolie (mère).

Trois mois plus tard, mon gestionnaire a accepté de me muter à Ottawa, ce qui me permettait de continuer à occuper mon poste de senior. Il m’a même accordé une augmentation de salaire et félicité pour le bon travail que j’accomplissais. Rapidement, le montant de mon portefeuille de placements s’est retrouvé plus élevé de presque 50 % qu’avant la pandémie. Quelques jours après notre arrivée à Ottawa, nous avons trouvé une place pour notre garçon dans une excellente garderie qui requiert généralement une attente d’un an avant d’espérer y être admis. Au beau milieu des conditions de marché immobilier les plus concurrentielles de l’histoire du Canada, nous avons pu trouver la maison de nos rêves à un prix moindre que celui que nous avions envisagé. Mes liens avec ma famille se sont améliorés et, pour la première fois depuis la naissance de mon fils, je me sens confiant en tant que parent. J’ai de l’énergie et je suis à nouveau enthousiaste par rapport aux années à venir. Je m’implique plus que jamais dans toutes mes activités, bouddhiques ou autres. Je fais maintenant partie du conseil d’administration de l’école de mon fils et j’ai démarré une petite entreprise. J’ai aussi retroussé mes manches pour rénover notre nouvelle maison, tout en faisant de mon mieux dans les activités de la SGI. Enfin, je ne ressens plus aucune douleur !

Traverser cette épreuve de santé m’a appris à quel point nous pouvons facilement penser que nous ne sommes pas chanceux dans la vie. Les êtres humains ont tendance à voir ce qu’ils n’ont pas plutôt que le contraire. En constatant que des gens possèdent plus que nous, il est plutôt commun de se sentir dépourvu. Ainsi, tandis que nous nous apitoyons sur notre sort, nous ne remarquons pas que les personnes qui ont plus que nous se concentrent également sur ce qu’elles ne possèdent pas. La pratique du bouddhisme de Nichiren Daishonin m’a permis de briser ce cycle incessant de pensées négatives. [Le bouddhisme] m’a montré que nous pouvons littéralement changer le monde en changeant tout simplement notre état de vie. J’ai découvert qu’en renforçant ma détermination de toujours cultiver un cœur reconnaissant, j’étais parvenu à libérer mon potentiel inhérent. Les immenses bienfaits que j’ai obtenus découlent de ma récitation de Nam-myoho-renge-kyo avec ce vœu inscrit dans mon cœur, et je pressens que ce n’est que la pointe de l’iceberg. Je termine en citant le président de la SGI, Daisaku Ikeda :

« Il n’existe personne qui ne soit plus fort qu’un individu dont le cœur est toujours empli de gratitude. »[ii]

 

Publié en juin 2022 ère nouvelle 

 

* Consulter le glossaire en troisième de couverture.

 

[i] Le « Master of Business Administration » (MBA) est un diplôme international d’études supérieures de gestion et de management des entreprises. 

[ii] Traduction libre, https://www.daisakuikeda.org/sub/quotations/theme/gratitude.html